Communiqué de Coup de pouce - Protection de l'enfance
L’association Coup de Pouce-Protection de l’enfance ne peut qu’exprimer son incompréhension et sa colère quant au projet de loi relatif aux violences sexuelles présenté ce jour par le gouvernement, lequel renonce finalement à instaurer une présomption d’absence de consentement pour les mineurs de moins de 15 ans, contrairement aux annonces répétées de la secrétaire d’état à l’égalité hommes-femmes, comme aux déclarations du Président de la République dans son allocution du 25 novembre 2017.
De la parole aux actes, il y a manifestement un pas infranchissable lorsqu’il s’agit de protéger nos enfants…
Là où Mme Schiappa affirmait « nous devons inscrire clairement dans la loi qu’en deçà d’un certain âge, il n’y a pas de débat sur le fait de savoir si l’enfant est ou non consentant » (lemonde.fr, 15/10/17) et où la mission sur les infractions sexuelles commises à l’encontre des mineurs estimait indispensable « d’éviter le débat judiciaire sur le consentement de la victime, débat jugé destructeur et traumatisant par tous les praticiens, en fixant un âge en dessous duquel le mineur n’est pas en mesure de consentir », le gouvernement renonce purement et à son projet sans aucune justification sérieuse !
Comment ne pas être atterré que le texte évoqué aujourd’hui se contente d’ajouter à la définition de la contrainte : « Lorsque les faits sont commis sur la personne d'un mineur de 15 ans, la contrainte morale ou la surprise peuvent résulter de l'abus de l'ignorance de la victime ne disposant pas de la maturité ou du discernement nécessaire pour consentir à ces actes »
L’expression « peuvent résulter » démontre l’aspect dorénavant anecdotique de cette « réforme » : loin d’établir une présomption, on se propose juste de donner un exemple supplémentaire de contrainte, sans que cet ajout n’ait aucun caractère contraignant, ni que les
juges aient d’ailleurs le moindre besoin de ce type de précision…
Les interdits de société fondamentaux doivent pourtant être clairement posés par la Loi et non laissés à l’appréciation des juges. En guise de « principe clair d’interdiction » et de renforcement de la protection des mineurs, on en reste donc aux errements du système législatif actuel, pourtant clairement mis en évidence par les affaires de Pontoise et de Meaux, qui vont pouvoir se multiplier et créer de
nouveaux désastres pour les victimes.
De plus, l’association Coup de Pouce-Protection de l’Enfance regrette vivement que nos responsables politiques se refusent à modifier un système juridique qui considère, au mépris de tout bon sens, qu’un enfant pourrait consentir à son propre inceste. Cette aberration va donc continuer à avoir force de loi dans notre pays, alors que la majorité des agresseurs sexuels sont des membres de la famille de la victime.
Ce manque de courage politique nous montre que le gouvernement Français est incapable à ce jour de construire une véritable protection de l’enfance, malgré les déclarations d’intention de nos responsables politiques.
Les obstacles juridiques invoqués ne sont pas sérieux, la Cour Européenne des Droits de l’Homme n’interdisant aucunement le jeu de présomptions en droit pénal mais exigeant simplement qu’elles restent dans des « limites raisonnables ».
D’ailleurs, on relèvera avec intérêt qu’aucun des pays européens ayant adopté une présomption d’absence de consentement (Belgique, Angleterre ou Allemagne pour ne citer qu’eux) n’ont vu leur législation remise en question par la CEDH…
L’Angleterre dispose ainsi, dans son arsenal juridique et de façon parfaitement licite au regard du droit international, d’une présomption irréfragable d’absence de consentement depuis 1956. Plus de 60 ans après, la France ne semble toujours pas disposée à combler son retard…
Et la protection de l’enfance reste de toute évidence une formule creuse ou une incantation, mais certainement pas une priorité pour nos gouvernants.
Pascal CUSSIGH
Président de l’association Coup de
Pouce-Protection de l’enfance